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Xavier Casalta |
Pour les pensées qui m\’occupent et qui me serrent, qui me piquent trop souvent, je veux parler des soucis du monde, les conflits humains immémoriaux, la levée des drapeaux bruns et des faisceaux immondes, l\’abandon des mesures accordées et si faibles pourtant, au profit du profit, l\’impossible unité des désirs innombrables de changement radical, la révolte engluée devant trop de belles et longues paroles, le cri du cœur jeté aux terrains vagues, le vaccin interdit là-bas dans nos anciennes annexes, les coups de l\’époux fou sur l\’épouse apeurée, l\’enfance spoliée et vidée de sa substance neuve, la jeunesse isolée dans des dortoirs immondes, les arbres abattus au centre de nos terres, le porte-feuille puissant qui lorgnent des gambettes et qui est prêt à tout payer rubis sur l\’ongle, l\’onde de l’algorithme désormais au pouvoir, mais aussi celles – les malignes pensées – de notre modeste quotidien d\’êtres sans ressources, que mangerons-nous demain, comment ne pas râler quand la pluie imprévue vient creuser la dalle en ciment fraîchement tirée, l\’âge et son cortège de génies malhonnêtes rognant la nuit et refusant l\’offre d\’un petit sommeil calme, les mauvais esprits enfouissant le corps dans le marais des nerfs, le trouble occasionné par l\’absence du chat, le voisin dans son immobilisme serein et qui jette en pâture aux ogres de l’acculture tout ce qui n\’est pas chrétien, les articulations sujettes aux jeux du temps, les rhumatismes, l\’arthrite, l\’attente … pour les pensées qui m\’occupent, qui me pèsent, et la fuite impossible devant leur persévérante présence néfaste, j\’ai quelques remèdes insignifiants.
Je lis.
Je peux chanter aussi.
Je m\’assois sans rien faire.
Une respiration.
Je regarde mon amie, mon âme, son jeu dans la lumière d\’un matin rigolard.
Et puis la fleur
éclose
épanouie
dans un bourdonnement d\’abeilles.